Oui… Quel plaisir de revenir vers Lui !…

Si l’un de nous observe bien les prévenances et les grâces qui lui parviennent d’Allah, Exalté soit-Il, celles qui coulent dans ses veines, celles qui brillent sous son regard ou celles qui distillent un plaisir olfactif ou auditif, s’il continue à les contempler et à les scruter près de vingt quatre heures, son cœur tombera réellement amoureux de Celui Qui en est l’origine et il sentira un ardent désir de Le rencontrer.

Ainsi voudrais-je te parler d’exemples de prévenances :

Observe bien la bénédiction du sommeil dans lequel tu baigne par la grâce d’Allah, Exalté soit-Il, quelques heures après un labeur journalier, après une tension nerveuse, pourtant tu n’a pas à faire quoi ce soit pour bien dormir… puis arrête-toi devant la bénédiction du réveil grâce à quoi tu reviens aux fonctionnalités de la vie liées aux sentiments, à la mémoire et à la perception… ensuite réfléchis, en allant aux toilettes, aux toxines dont Allah te débarrasse et te sauve de leurs séquelles… de retour, contemple sous la douche cette merveilleuse substance liquide caractérisée par une transparence sans aucune teinte et par une pureté exempte d’odeur et de goût faute de quoi elle aurait perdu ses qualités et aurait manqué sa vocation, observe bien cette merveilleuse chose qu’on appelle « eau », et n’oublie pas que si elle manquait à la vie d’un homme quarante et huit heures il se serait senti répugnant et il aurait trouvé sa vie dégoûtante… une fois attablé pour déjeuner, regarde bien les variétés clairsemées qui en découlent, tu verras le produit d’un ciel pluvieux, d’une terre fertile et d’un bétail dont Allah a mis les viandes et les produits laitiers à ta disposition. Dès que tu commence à manger le fruit d’une terre, d’un ciel et d’un bétail qu’Allah a mis à ta disposition, observe comment tu mâche la bouchée dans la cavité de ta bouche, avant de l’expédier à travers le gosier, et pose-toi la question : Pourquoi n’a-tu pas mordu la langue au contact du morceau de viande que broie la meule des molaires et qui trouve ensuite son chemin, tout apetissant, vers ta gorge puis ton ventre. Tu te retrouve face à des prévenances divines qui prennent soin de toi dépassant l’attention portée par la mère à son bébé.

Ceci n’était qu’un tout petit échantillon de prévenance porteuse d’attention et de protection à l’intérieur de ton corps…

Mais face aux autres prévenances comme celles soufflent en brises autour de toi, celles qui rayonnent en fleurs et en roses sous ton regard, celles dont le parfum flatte ton sens olfactif ou celles dont la musique enchante ton sens auditif et procure en toi un état de bien-être, je ne peux qu’en dire, faute d’un meilleur lexique : Elles constituent vraiment des messages d’amour ou de tendresse qu’Allah t’envoie… Certes, y trouves-tu un soutien pour surmonter un chagrin d’amour ou une interprétation mélancolique d’un cœur brisé sinon l’écho d’une nostalgie profonde en toi.

Afin que ton cœur devienne un réceptacle d’amour face à ton Grand Seigneur, Ce Prévenant, tu n’as donc qu’à scruter, à l’aide d’un esprit alerte, Ses prévenances et les messages d’amour qui te parviennent de Sa part pendant au moins vingt-quatre heures d’affilé.

* * *

Je voudrais, néanmoins, m’appuyer sur ce que je viens d’exposer pour introduire une autre vérité renfermant des prévenances divines d’un autre genre, des prévenances qui attendrissent le cœur et qui touchent profondément le côté humain d’une personne toute confuse devant Celui Qui est à l’origine de ces merveilleuses prévenances et Qui lui manque, Celui Qu’il aime tant:

Ton Seigneur te voit t’éloigner de Lui, absorbé par le flot de tes passions, dominé par tes excès, virant d’un plaisir à l’autre, occulté par tes occupations et par ta volonté de réaliser tes rêves et tes aspirations, mais cela ne fait qu’affermir Son amour, Sa clémence et Sa bienveillance envers toi (tant que ton éloignement de Lui n’est pas motivé par un sentiment d’orgueil qui te submerge ou par une illusion de puissance qui te fait penser que tu peux te passer de Lui et de Son aide). Il ne te laisse, ainsi, quitter la vie qu’après t’avoir amené dans Son giron et invité à une réconciliation avec Lui tout en attirant ton attention à Son immense amour envers toi et à Son intense soin de toi. Mais Il dit : Le moment n’est-il pas venu pour que tu reviennes de ta virée égarée à la poursuivre d’un mirage luisant, pour retourner vers Celui Qui tient en main ta destinée et ton issue ? N’es-tu pas encore réveillé par l’éclat des illusions derrière quoi tu t’es épuisé à courir pour découvrir enfin la vérité et pour que tu saches qu’elle détient les clefs de ton bonheur ? Ne t’es-tu pas lassé de te servir des coupes remplies de tes illusions et décidé de revenir à la claire fontaine, à la douce source, à ton Dieu Qui peut t’ouvrir l’esprit et t’arranger la vie, Celui Qui fait rire, Qui fait pleurer, Qui fait périr et Qui fait vivre ?

Ces interrogations débordantes de reproches et d’amour de la part de ton Seigneur, Exalté soit-Il, correspondent à une interprétation détaillée et précise de Sa question pleine d’attention et d’amour :

« Le moment n’est-il pas venu pour ceux qui ont cru, que leurs cœurs s’humilient à l’évocation d’Allah et devant ce qui est descendu de la vérité [le Coran] ? » [Coran, Al-Hadid : 16 ].

Combien de fois a-t-Il suivi de près Ses serviteurs égarés et perdus jusqu’à ce qu’ils virent et reviennent vers Lui en disant : « Si Seigneur, le moment est venu ! » Il a pressé par cette douce et aimable question cet égaré de son sentier Al-Foudhayel Ibn Iyadh, Il a pressé par elle le jeune épris par les divertissements Abdullah Ibn Moubarak, Il a pressé par elle l’émir absorbé par ses plaisirs Bich’r Al-Hafi, ainsi que de nombreuses personnes avant eux, de ce fait, ils se sont tous réconciliés avec leur Seigneur qui les a choisis et invités auprès de Lui. Ils ont goûté au plaisir vivifiant d’être proche de Lui après avoir longuement souffert de la solitude loin de Lui, et ils font désormais partie de l’élite bienfaisante de Ses serviteurs.

Tu pourrais bien voir comment cette même question chargée de reproches presse-t-elle aujourd’hui des personnes qui n’en font qu’à leurs têtes et qui suivent leurs bas instincts en s’adonnant à des modes de vie leur faisant oublier la réalité de leur servitude envers Allah et en les empêchant d’écouter le chatoyant discours d’Allah porteur d’ordres et d’interdits… Puis, il suffit de quelques évènements passés, de quelques mots édictés par Allah parvenant à leurs oreilles, de visions ou de songes leur révélant d’une manière ou d’une autre Allah, d’une pause devant la maison d’Allah [La Kaaba] ou d’un moment opportun d’appréhension devant la dernière demeure du Messager d’Allah, pour que la foi se réveille en eux, pour que l’ultime amour sacré d’Allah, Exalté soit-Il, envahisse leurs cœurs, pour que le sentiment de honte à Son égard domine leur conscience, pour que les épais rideaux se dégagent devant leur regard et devant leur perception, à ce moment-là chacun d’eux parviendra-t-il à entendre le fin reproche divin dire : le moment n’est-il pas venu pour toi pour que tu saches que c’est Moi Qui mérite ton amour… c’est Moi Qui te donne avant même que tu sollicite… c’est Moi Qui te porte secours avant même que tu le demande… c’est Moi Qui te tiens compagnie pendant tes longues nuits de solitude, c’est Moi qui t’aide dans tes moments difficiles… La beauté dont ton cœur est épris, J’en suis à la fois le secret et l’origine ; le plaisir que tu recherche, J’en suis le Concepteur, Je l’offre au mérite.

Est-ce que les gens égarés aujourd’hui sont si loin du mihrab de la soumission à Allah ? Qui les a-t-il ramené moyennant ce reproche divin si touchant à l’oasis de la soumission à Son égard ? Ce revirement ne tenait qu’à un regard tendre d’Allah à leur destination, c’est le choix divin qui ne tient ni à une étude approfondie ni à une discussion soutenue ni à un débat, cela n’a rien à voir avec ta volonté de les guider à l’aide d’une argumentation intellectuelle étayée et alarmante, il s’agit plutôt d’un sauvetage de la vallée stérile de l’égarement vers le sentier d’affiliation et d’attachement, et bien souvent cela se produit-il du jour au lendemain… Si tu te demandais quelle force attractive les a-t-elle soudain mutés de l’obscurité de l’égarement et de l’ignorance vers la lumière de la droiture et de la gratitude, je te dirais : C’est celle de l’amour… l’amour venant d’Allah vers Ses serviteurs, avant même celui venant du serviteur vers son Seigneur. En observant l’état de ceux-là (les élus) tu t’aperçois bien qu’ils baignent dans la liesse liée à l’amour et à la bienveillance d’Allah à leur égard, loin devant leur amour et leur satisfaction à Son égard.

C’est ce que j’appelle la bienveillance divine qui se distingue des autres grâces et des autres prévenances Qu’il nous offre, Exalté soit-Il, j’en ai déjà évoqué quelques exemples, ce sont des prévenances qui t’attirent vers Lui et qui te ramènent de ton égarement vers une réconciliation avec Lui et une soumission à Son égard. Plus que l’amour, ces prévenances qui te tombent dessus te font connaitre la passion et l’attachement à Son égard.

Et sachons, quand on est touché par ces prévenances, que l’on a fait l’objet de cette sélection, cela arrivera tôt ou tard, les péchés dans lesquels on s’enfonce ne parviendront pas à empêcher ces bienveillances divines… qui justement poursuivent les désobéissants en priorité. Toutefois, il existe une seule catégorie de personnes qui ne serra jamais touchée par ces bienveillances divines, celle des orgueilleux devant Allah, celle de ceux qui mésestiment Ses consignes et qui rejettent la réalité de leur servitude à Son égard. Pour ceux-ci, Allah a tranché depuis la tradition ancestrale de ne pas débarrasser leur raisonnement des écrans de l’aberration et de ne pas ôter de leur émotionnel les enveloppes de cruauté et d’entêtement. Il s’agit de ceux qu’Allah a décrits de la manière suivante :

« J’écarterai de Mes signes ceux qui, sans raison, s’enflent d’orgueil sur terre. Même s’ils voyaient tous les miracles, ils n’y croiraient pas. Et s’ils voient le bon sentier, ils ne le prennent pas comme sentier. Mais s’ils voient le sentier de l’erreur, ils le prennent comme sentier. » [Coran, Al-A’raf : 146].

Mais évitons de parler de ceux dont l’évocation nous plonge dans une solitude de laquelle nous nous affranchirions volontiers, et revenons au sujet portant sur les bienveillances d’Allah et sur les gens dont Allah en fait les destinataires mérités. Ils pourraient s’enfoncer dans l’égarement et dans la désobéissance, ils sont néanmoins les victimes de leur faiblesse et de leur incapacité à corriger leurs écarts, ils sont à l’image du malade persuadé qu’il a besoin du médicament, ou d’un alcoolique qui regarde, tout brisé, les gens à qui Allah épargne cette épreuve… Sache pertinemment que les prévenances d’Allah ne les abandonneront pas, et qu’ils feront incontestablement l’objet d’un traitement clément et bienveillant.

Je te conseille d’éviter de les mépriser ou de les sous-estimer, tu ne sais pas ce que le futur leur réserve. Les jours à venir pourraient bien les révéler comme imams ou prédicateurs bienfaisants, tant d’hommes et de femmes parmi nous en sont l’exemple, et nous espérons qu’Allah nous accorde la grâce de leur invocation.

Les circonstances liés à une date ou à un lieu, à l’occasion desquelles les prévenances sélectives envers les égarés de l’immensité d’Allah, sont à la fois multiples et variées, les présents jours et nuits du Ramadan n’en sont qu’un bon exemple.

Et sache bien que le degré d’amour ou de colère d’Allah n’est pas lié à l’instant où tu vois quelqu’un en état d’obéissance ou de désobéissance, mais est plutôt lié au malheur de se détourner de Lui ou à la grâce de revenir vers Lui…

Scandons, donc, ensemble le chant du retour vers Son immensité, le chant d’astreinte au pas de Sa porte, en disant tous : Quelle joie de revenir vers Lui… en effet, quelle joie de revenir vers Lui.

Mohamed Saïd Ramadhan Al Bouti – Professeur à l’université de Damas

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